La consécration d'un droit fondamental à l'eau est nécessaire en France. Etude de droit comparé le démontrant - Núm. 16-1, Enero 2017 - Revista Jurídica Piélagus - Libros y Revistas - VLEX 704459613

La consécration d'un droit fondamental à l'eau est nécessaire en France. Etude de droit comparé le démontrant

AutorValérie Bernaud
Páginas25-44
La consécration d'un droit fondamental à l'eau est
nécessaire en France. Etude de droit comparé le
démontrant*
The recognition of a fundamental right of access to water is
necessary in France. It will be proven in this comparative and
demonstrative law study
El reconocimiento del derecho fundamental al agua es
necesario en Francia. Estudio de derecho comparado que lo
demuestra
25
Envoyé: 10/01/17 Approuvé: 06/03/17
DOI: http://dx.doi.org/10.25054/16576799.1450
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Valérie Bernaud
Université d'Avignon et des pays du Vaucluse, Francia
vbernaud@hotmail.com
RÉSUMÉ
Bien que la France soit une grande donneuse de leçons quant au respect des droits fondamentaux, elle ne consacre pas ni
au rang constitutionnel, ni au rang législatif un droit fondamental à l'eau. Cette lacune aurait pu être palliée par le Conseil
constitutionnel, mais celui-ci n'a adopté qu'une jurisprudence frileuse à cet égard. Les multinationales françaises de l'eau,
fortes de leur pouvoir économique, luttent avec acharnement contre les lois protectrices et la reconnaissance explicite
d'un tel droit dans le bloc de constitutionnalité serait la bienvenue. L'idée n'étant pas à la mode en France, une étude de
droit comparé avec les États d'Amérique latine ouvrira de nouvelles voies de réflexion pour, peut-être un jour, franchir le
pas.
MOTS CLÉS
Constitution; Droit Comparé; Droit Fondamental à L'eau; Eau; États d'Amérique Latine et France; Jurisprudence
Constitutionnelle.
ABSTRACT
Although France is a quintessential example of the provision of fundamental rights, it does not give constitutional or
legislative status to the fundamental right of access to water. The Constitutional Council could have offset this omission,
but it has only adopted a hesitant jurisprudence of this issue. French multinational water companies, with their economic
power, are fighting protective laws. The explicit recognition of such a right in the Constitutional Block would be a welcome
addition. Since the idea is not popular in France, a comparative law study of Latin American states will allow for new ways
of reflection, which would possibly permit to bridge the gap.
KEYWORDS
Comparative Law; Constitution; Constitutional Jurisprudence; Fundamental Right of Access to Water; Latin American and
French States; Water.
Revista Jurídica , Vol. 16 No. 1 pp. 25-44Piélagus Enero a junio de 2017 / Neiva (Huila) Colombia
* Article de recherche
1 - Maître de conférences habilitée à diriger des recherches. Membre du LBNC, EA 3788.
Valérie Bernaud
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Revista Jurídica , Vol. 16 No. 1Piélagus Enero a junio de 2017 / Neiva (Huila) Colombia
RESUMEN
A pesar de que Francia es un importante proveedor de enseñanzas en materia de derechos fundamentales, no otorga un
estatuto constitucional o legislativo al derecho fundamental al agua. Esta brecha podría haber sido subsanada por el
Consejo Constitucional, pero éste solo ha adoptado una jurisprudencia vacilante ante este aspecto. Las multinacionales
francesas del agua, con su poder económico, están luchando contra las leyes protectoras; el reconocimiento explícito de
tal derecho en el bloque de constitucionalidad podría ser bienvenido. Puesto que la idea no es popular en Francia, un
estudio del derecho comparado con los estados latinoamericanos abrirá nuevas vías de reflexión, para tal vez un día,
poder dar este salto.
PALABRAS CLAVE
Agua; Constitución; Derecho Comparado, Derecho Fundamental al Agua; Estados de América Latina y Francia;
Jurisprudencia Constitucional.
INTRODUCTION
Contrairement à de nombreux Etats d'Amérique centrale
ou d'Amérique du sud, la France ne consacre pas au rang
constitutionnel un droit fondamental à l'eau. En France,
l'accès permanent à une eau potable de qualité semble
absolument normal à chacun de ses habitants et nul ne
songe qu'il pourrait en être autrement, à part la minorité de
personnes en situation de précarité extrême (environ 150
000 personnes sur 66 millions) qui, soit, se trouvent dans
l'impossibilité de payer leurs factures, soit, n'ont aucun
accès à un point d'eau potable faute de vivre dans un
logement décent. Néanmoins, pour la très grande
majorité des français avoir de l'eau chez soi à un prix
raisonnable est une évidence et tant que les tarifs et la
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qualité demeureront convenables , l'idée de faire inscrire
au rang constitutionnel un droit fondamental à l'eau
s'apparentera à un caprice inutile.
Pour comprendre cette apathie française au regard du
droit à l'eau, il est utile de revenir brièvement sur la
gestion de l'e au potable en France, laquelle est
organisée par les lois et règlements administratifs. Ce
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sont les communes qui, historiquement, se sont vu
confier l'approvisionnement en eau des populations et
son assainissement. La gestion du service public de l'eau
est un service public industriel et commercial (SPIC) qui
peut être assurée soit directement par la commune en
«régie», soit être déléguée par contrat à une société
privée (affermage, concession, gérance …). Or, depuis la
ème
fin du 20 siècle, la distribution et l'assainissement
4
sont de plus en plus privatisés , les collectivités locales
se désengageant de ces derniers pour des raisons
budgétaires, l'édiction de normes de qualité de plus en
plus strictes rendant leur coût trop important pour nombre
5
d'entre elles . A tel point qu'à ce jour, 76 % des français
sont desservis en eau potable par des entreprises privées,
dont les 3 principales sont la SAUR Internationale (groupe
Bouygues), le groupe Suez et le groupe Veolia. Trois
multinationales gèrent donc depuis plusieurs décennies
l'essentiel du marché français de l'eau, multinationales qui
se sont ensuite «appuyées pour leur développement
international sur les positions et la force de frappe acquise
6
grâce à un marché français quasi «captif» » .
Bien que la France n'ait pas encore reconnu le droit à l'eau
en tant que droit fondamental de valeur constitutionnelle,
elle instaure néanmoins certaines garanties d'un point
de vue législatif, en lien ou pas avec les exigences de
l'Union européenne. D'une part, les entreprises privées
susnommées exercent leurs compétences dans le cadre
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d'un marché réglementé . D'autre part, le législateur est
intervenu ces dernières années afin de renforcer la
protection des citoyens. C'est ainsi que la loi «Brottes» du
15 avril 2013 a modifié l'article L 115-3 du Code de
l'action sociale et des familles. Elle interdisait initialement
2 - Bien qu'en France le coût de l'eau (7 % par an) augmente plus vite que le coût de la vie (5.8 % par an), le prix variant de 1.50 euro par
m3 à 5.26 euros par m3 dans les communes les plus chères, source ONEMA.
3 - C'est une compétence traditionnelle depuis la Révolution française, mais elle n'a été officiellement consacrée que par la loi du 30
décembre 2006 et codifiée dans les articles L 2224-7 et L 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales).
4 - Notons qu'il ne s'agit quand même pas d'une privatisation pure et simple car l'autorité publique demeure responsable de la qualité
de l'eau et des investissements et garde la propriété des infrastructures.
5 - Mais pas seulement: en France l'émiettement des communes françaises les rend trop faibles pour porter seules le service public de
l'eau (sauf en cas d'intercommunalité). En outre, comme le souligne O. Petitjean, « France : de la gestion privée à la
remunicipalisation de l'eau ? », 2009, consultable in http://www.partagedeseaux.info – se pose l'épineux problème de la corruption
et du financement occulte de la vie politique : « la passation de contrats de délégation étant un écran commode pour les transferts de
fonds depuis les entreprises vers les partis ».
6 - Op.cit.
7 - Par exemple, elles ne fixent pas directement elles-mêmes le prix de l'eau.

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